Contrairement aux engagements pris par le Ministre de
l'Éducation, les travaux de désamiantage du campus ne
commenceront pas ce printemps. Le plus grand flou règne encore
actuellement sur le calendrier des opérations. Les retards ne
sont justifiés par aucune raison technique: la seule raison est
que certaines opérations préliminaires qui auraient
dû être engagées il y a 6 mois, sont encore en
discussion ...
Cela résulte en premier lieu de la confusion qui règne
dans la gestion de ce dossier: le ministère n'a pas mis en
place les moyens, à l'évidence indispensables, pour
conduire une opération aussi sensible, en attendant la
création de l'Établissement Public. À cela
s'ajoutent les pressions considérables qui s'exercent pour
faire échouer le plan de désamiantage. Ce ne sont pas
les motivations qui manquent: financières, immobilières
ou judiciaires. Il y a enfin l'attitude injustifiable de la
présidence de Paris 7 qui en est arrivée à
prendre le désamiantage en otage pour essayer d'imposer le
déménagement sur la ZAC Tolbiac qu'elle n'a pu obtenir
par les voies normales. Bien qu'un retard important ait
été pris, le plan de désamiantage lui-même
n'est nullement remis en cause. Le respect dans le futur du calendrier
prévu dépendra de notre capacité à faire
prévaloir les impératifs de santé publique sur
les autres considérations.
La situation actuelle
Le programmiste et le maître d'oeuvre, qui sont chargés
respectivement de la programmation des déménagements et
de l'organisation des travaux, sont au travail. Mais tout cela se fait
dans le plus grand désordre: programmiste et maître d'oeuvre
travaillent depuis maintenant plusieurs mois sans avoir reçu de
directives claires... Le même désordre règne en ce
qui concerne la construction des 25 000 m2 de
préfabriqués: trois tranches, avec trois responsables
différents (P6, P7 et le rectorat), qui décident au
gré de leur imagination sans réflexion préalable
ni concertation.
Seule la mise en place de l'Établissement Public, qui assumera
la responsabilité des opérations de désamiantage
du campus, est susceptible de changer cette situation et de garantir
que les retards déjà pris seront les seuls. Le
décret de création de cet Établissement Public a
reçu un avis favorable du conseil d'état le 18 mars et devrait
être publié au journal officiel dans les jours qui
viennent, après signature des ministres concernés. Il
faudra encore compter quelques semaines pour qu'il devienne
opérationnel: nominations diverses (un président, un
directeur, un agent comptable, etc.), attribution de locaux (sur le
campus ou à proximité), etc.
En ce qui concerne les locaux provisoires, seul l'immeuble du CEA, rue
de la Fédération peut être utilisé à
court terme. La construction des préfabriqués a pris un
retard considérable, qui se répercutera
inévitablement sur le désamiantage lui-même. La
première tranche de 6000 m2 sur le campus, sous la
responsabilité de Paris 7, qui devait être disponible en
septembre vient d'être annulée (voir plus loin) et ne
verra probablement pas le jour avant le printemps 1998. Une seconde
tranche de 6000 m2 sur le campus, sous la responsabilité de
Paris 6, ainsi que 13000 m2 à Gentilly , sous la
responsabilité du Rectorat, sont prévus officiellement
pour décembre 1997.
Le chantier test de désamiantage.
Une bonne nouvelle quand-même: le chantier test de
désamiantage du Groupe de Physique des Solides s'est
déroulé normalement, contrairement à ce qui a pu
être écrit ici ou là. Les mesures
effectuées dans les couloirs adjacents ont montré que le
dispositif de confinement fonctionnait et que le désamiantage
n'entraînait pas de pollution hors du chantier. Les mesures
libératoires après désamiantage étaient
à moins de 1 fibre/litre, ce qui témoigne d'un arrachage
correctement effectué.
Un seul incident a eu lieu lors de ce chantier: une pollution anormale
a été constatée dans la zone de chantier en
sortie de sas; le chantier a été immédiatement
arrêté et la zone dépolluée. Ce genre
d'incident en sortie de sas n'est pas exceptionnel sur les chantiers
de désamiantage. Il pose le problème de la protection
des ouvriers, qui n'a pas encore reçu une attention suffisante, bien
que les progrès enregistrés ces derniers mois soient
considérables. Nous avons demandé et obtenu la
collaboration de l'INRS (Institut National de Recherche en
Sécurité) pour que cette question essentielle soient
étudiée (et résolue) dès le début
du chantier de Jussieu.
Ce chantier test a été remarquable à plusieurs titres:
Gentilly: désinformation organisée.
Le désamiantage de Jussieu fait l'objet de nombreuses rumeurs
qu'il serait fastidieux de réfuter une par une. Toutes vont
dans le même sens: montrer que le désamiantage est une
opération extrêmement compliquée, impossible
à réaliser sans une évacuation complète du
campus.
Depuis un certain temps, on est même passé
à la désinformation officielle. Lors d'une
réunion d'information des correspondants amiante de
l'université Paris 7 (qui sont censés rapporter ensuite
l'information dans leur laboratoire) tenue le 26 février le
vice-président chargé des locaux a affirmé, en
brandissant un plan des carrières de Gentilly, que le site
était «inconstructible» et qu'il fallait
<<oublier les préfabriqués de
Gentilly>>.
Qu'en est-il en réalité? Il y a effectivement des
carrières à Gentilly (comme à beaucoup d'autres
endroits à Paris) et cela était connu au moment de la
décision d'utiliser le site de Gentilly. Le terrain est
constructible, et les travaux de consolidation nécessaires, ont
été prévus. La construction de
préfabriqués à Gentilly est toujours à
l'ordre du jour. Les retards ne sont pas dus à la
présence de carrières, mais aux lenteurs de
l'administration, et plus encore à la véritable guerilla
à laquelle la présidence de Paris 7 s'est livrée
ces derniers mois pour empêcher la construction de
préfabriqués à Gentilly et y substituer des
locaux sur la ZAC Paris Rive Gauche ... dont la livraison ne pourrait
intervenir avant plusieurs années.
Nous devons malheureusement constater que les initiateurs du projet de
déménagement sur la ZAC se sont progressivement
transformés en des opposants de fait au désamiantage:
ils font tout pour bloquer le désamiantage en espérant
ainsi contraindre le Ministère à financer une nouvelle
université, au risque de faire échouer les deux.
L'opposition au site de Gentilly n'a pas d'autre explication.
Préfabriqués sur le campus: marché annulé.
Si les constructions sur Gentilly ne sont pas remises en cause, il
n'en va pas de même de la première tranche de
préfabriqués sur le campus, dont la
responsabilité avait été confiée à
Paris 7. L'opération avait été lancée en
juillet 1996 et suivait son cours - sans précipitation
excessive - pour aboutir à une livraison d'environ 6000 m2
prévue en septembre prochain. L'université avait
refusé toute concertation lors de l'élaboration du
cahier des charges et de la sélection finale, contrairement
à ce qui s'était passé pour toutes les autres
opérations liées à l'amiante.
La commission des marchés (commission dépendant du
ministère de l'économie et des finances chargée
d'examiner tous les marchés publics) a relevé des
irrégularités importantes dans la sélection de
l'entreprise et rendu un avis défavorable. Le président
de l'université a alors décidé d'annuler le
marché.
Le résultat de cette annulation est un retard
supplémentaire d'au moins 6 mois. Nous demandons que le dossier
soit rendu public pour que chacun puisse apprécier les
responsabilités.
De la sécurité à Jussieu.
Toutes les querelles actuelles, qui ne font que retarder les travaux, ne sont pas à la hauteur des enjeux. Nous sommes, faut-il le rappeler, face à un problème de santé publique et de sécurité sur le campus qui nécessite une solution urgente. Les travaux prévus comprennent à la fois le désamiantage et la mise en conformité des installations électriques et de la protection incendie. Les questions de sécurité se posent pendant le chantier, mais aussi dès maintenant: la sécurité incendie n'est pas actuellement assurée.
Malheureusement, la santé publique et la sécurité des occupants du campus ne sont toujours pas les priorités pour les responsables. Dès qu'un problème concret se pose, ces questions sont évacuées.
Sans réflexion préalable ni concertation, les
universités ont décidé d'affecter prioritairement
les préfabriqués sur le campus à l'enseignement.
Dans ce choix les questions de sécurité n'ont pas
été prises en compte. N'aurait-il pas été
plus raisonnable d'essayer de diminuer un peu le flux
d'étudiants sur le campus pendant les travaux? La question
aurait au moins dû être posée. Le problème
n'est pas le risque dû au désamiantage lui-même,
mais le risque inhérent à la présence d'un
chantier important: le choix qui a été fait augmente le
flux d'étudiants à l'endroit où se trouveront des
installations de chantier.
Entre les inconvénients liés à des
déplacements provisoires d'enseignements et des
problèmes de sécurité que faut-il choisir? Pour
apprécier la place habituellement réservée
à la sécurité par nos présidences
universités, il suffit de regarder la situation actuelle.
Alors que les débuts d'incendie se multiplient, à cause
notamment de la vétusté des installations
électriques, les règles élémentaires de
sécurité ne sont pas respectées, engendrant un
risque considérable. Bibliothèques dont toutes les
issues de secours sont condamnées, alors que certaines
accueillent plusieurs centaines d'étudiants. Couloirs ou
demi-couloirs dont une extrêmité est condamnée.
Dans ces cas ce n'est pas le bâtiment qui est en cause, mais son
utilisation: on fait passer la sécurité des biens avant
la sécurité des personnes (alors que des solutions
simples permettraient de concilier les deux).