Jussieu, c'est 200 000 m2 de locaux floqués à l'amiante et un état de dégradation tel qu'il engendre une pollution importante et dangereuse.
L'action menée depuis novembre 1994 a certes radicalement changé la situation tant à Jussieu qu'au niveau national. Tous les responsables reconnaissent maintenant qu'on ne peut continuer ainsi de mettre en danger la santé de milliers de personnes et que des travaux immédiats s'imposent.
En témoignent les propos Mme Hubert, alors Ministre de la Santé, du 28 septembre sur France 2:
«pour Jussieu, il n'y a pas besoin d'être grand clerc pour voir ce qui est en train de se passer. Obligation de travaux. Sanctions si ce n'est pas fait.»
Mais des bonnes paroles aux actes, la distance peut être grande : il y a 20 ans déjà, des promesses avaient été faites, mais l'amiante est toujours là ! Cela ne peut plus durer. Il nous faut obtenir un engagement ferme sur un calendrier et un financement des travaux afin que soit mis fin le plus rapidement possible à cette situation inacceptable. L'unique solution raisonnable est
LE RETRAIT TOTAL DE L'AMIANTE DE JUSSIEU,
comme le reconnaissent maintenant toutes les autorités. Pour l'obtenir dans des délais décents, une mobilisation de tous les personnels et étudiants de Jussieu sera nécessaire.
Une étude de diagnostic (évaluation de l'état de dégradation des flocages et du risque induit) et de faisabilité des travaux de désamiantage (organisation et coût) est en cours. Les conclusions de cette étude devraient être connues le 23 novembre. Nous organiserons à cette occasion une assemblée générale pour informer tous les occupants du campus et décider ensemble des actions à mener.
[...]
L'amiante : un matériau dangereux.
L'amiante est un matériau doté de
propriétés remarquables mais très dangereux pour la
santé : il provoque des fibroses (asbestoses et plaques
pleurales) ainsi que des cancers mortels comme le cancer du poumon et
le mésothéliome (cancer de la plèvre ou du
péritoine). On compte actuellement environ 3000
décès par an, dus à l'amiante, en France. Le temps
de latence (délai d'apparition de la maladie après la
première exposition) des maladies provoquées par l'amiante
est très long: de 20 à 50 ans. À Jussieu nous sommes
donc au début de la période où se manifestent les
effets sur la santé et ceci pour les personnes les plus
exposées. Il y a aujourd'hui 16 cas de maladies
professionnelles liées à l'amiante sur Jussieu,
dont 4 n'ont subi aucune autre exposition à l'amiante que les
flocages de Jussieu. La plupart sont très récents (6 cas ont
été recensés cette année).
Les flocages à l'amiante : un risque inutile.
Les flocages à l'amiante ont été utilisés
principalement pour assurer une protection incendie des bâtiments
à structure métallique, comme ici à Jussieu. Le
procédé de flocage à l'amiante est interdit
depuis 1978 en France (décret du 20/3/78). Il aurait dû
l'être bien avant: au début des années 50, le
danger était déjà connu et des produits de
substitution existaient. Ainsi, en 1960, l'aéroport d'Orly,
premier grand chantier de protection incendie en France, a
été fait avec un flocage sans amiante.
Dans certains pays, comme l'Allemagne, une politique de
décontamination systématique des bâtiments
floqués à l'amiante a été mise en place
depuis plus de 10 ans. Ce n'est pas encore le cas en France, où peu de
bâtiments ont été défloqués, et pas
nécessairement ceux qui étaient les plus dangereux. Une
des actions nationales du Comité Anti Amiante Jussieu a
été de demander qu'une politique cohérente de
santé publique soit menée, concernant les bâtiments
contenant de l'amiante. Cette politique est en train de se mettre en
place.
À Jussieu un état des lieux est en cours.
Depuis 20 ans que le problème de l'amiante est connu à Jussieu,
aucun état des lieux n'avait été fait. Le
financement par le Ministère d'une étude complète a
été obtenu l'année dernière. Elle comporte un
diagnostic du bâtiment (état de dégradation de
l'amiante, évaluation du risque, etc.) et une étude de
faisabilité des travaux de retrait de l'amiante (phasage et
coût des travaux notamment). Cette étude, qui
nécessitait une visite systématique des locaux, à
débuté fin Juillet 95. Ses conclusions seront connues le
23 novembre. Il est d'ores et déjà évident
qu'elle dressera un constat accablant de l'état des lieux et
recommandera des travaux. La suite dépendra de notre
capacité à nous mobiliser pour obtenir le financement de
ces travaux.
Désamianter Jussieu.
Contrairement aux bruits qui circulent, le déflocage de Jussieu
ne requiert pas l'évacuation totale du campus et peut se faire
secteur par secteur (barre par barre, voire étage par
étage). Il est en revanche nécessaire de disposer de
locaux "tampons" pour pouvoir faire une rotation des divers
services.
L'opération de déflocage peut se faire en toute
sécurité, dès lors que les entreprises retenues sont
compétentes. Le coôt précis n'est pas connu, mais
on peut fournir les estimations raisonnables suivantes. Le coôt
du déflocage lui-même est d'environ 1000F le mètre
carré, donc 200 millions de francs pour les 200 000
mètres carrés floqués de Jussieu. Il est aussi
prévu de profiter des travaux de déflocage pour
rénover le bâtiment. Il s'agira en particulier de remettre aux
normes l'électricité et la sécurité
incendie, ce qui est évidemment nécessaire. Si l'on
tient compte de l'ensemble des opérations : déflocage,
rénovation et locaux tampons, il faudra très certainement
doubler le coût initial. On remarquera que ce coôt, important
dans l'absolu, reste somme toute modeste si l'on considère
qu'il s'agit de la santé de plusieurs dizaines de milliers de
personnes, ce qui équivaut à la population d'une ville
moyenne.
Comité Anti-Amiante Jussieu
Le Comité Anti-Amiante Jussieu, créé en octobre
1994, regroupe des personnels et étudiants des
universités Paris 6 et Paris 7 et de l'Institut de Physique du
Globe dans le but d'obtenir le retrait complet de l'amiante de
Jussieu dans les délais les plus brefs compatibles avec les
contraintes techniques et de sécurité. Il s'est
constitué en association loi 1901 en mars 95.